vendredi 6 janvier 2012

Année une de la révolution


L’année zéro de la révolution a vu des élections jugées libres et démocratiques avec l’émergence d’une nouvelle ancienne classe politique se réclamant d’un Islam modéré qui a pris les rênes du pays ne serait-ce que pour une année à moins qu’il n’y ait pas changement de calendrier et volonté de s’éterniser. Cette victoire électorale est perçue pour beaucoup comme un paradoxe. Une révolution marquée et menée par une forte mobilisation d’une jeunesse et d’une cyber-dissidence assoiffées de liberté et d’égalité des chances. Un cri très fort contre la marginalité, le désespoir et l’autocratie. Ainsi, n’est t-il pas antinomique que ce rêve caressé par toute une jeunesse dissidente se transforme en un pouvoir des forces jugées antimodernes obnubilées par un retour au monde de la divinité. Certains facteurs endogènes expliquent cette simili-victoire des islamistes. Une forte islamisation d’une frange de la société, laissée-pour-compte sous la dictature sur un fond de conservatisme social, a trouvé dans l’Islam politique son expression. A travers ce vote sanction, certains ont voulu exprimer leur rejet d’un modèle de société tourné vers la modernité auquel ils n’ont jamais pu accéder. Un cri face à des ères de marginalisation de ségrégation et de ghettoïsation. Certains politologues ont attribué ce succès à d’autres facteurs plus politiques : force et organisation de l’appareil islamiste, multitude de partis et listes ayant compliqué le choix des électeurs, utilisation des espaces de cultes pour la propagande, faillite de l’élite intellectuelle moderniste à canaliser l’électorat, prédominance de l’Ego au sein des forces démocratiques.
L’ampleur de cette victoire nourrit aujourd’hui beaucoup de scepticisme quant à la capacité du nouveau pouvoir à redresser la barre et répondre aux attentes d’une jeunesse gagnée par le désenchantement et la désillusion.
L’année une de la révolution que nous venons d’entamer ne sera pas pour autant très balisée, des défis à la pelle : apprentissage du pluralisme à tous les niveaux, poursuite des mobilisations pour faire aboutir des revendications ô combien escamotées dans le passé. Un vent de liberté et de démocratie qui continuera à nourrir les rêves et à alimenter l’espoir de poursuivre la révolte. Sur un autre plan les débats vont se poursuivre pour définir les contours de la démocratie et du pluralisme même si les composantes majoritaires de cet islamisme politique tunisien déclarent qu’ils ont rompu avec leurs mythes face à d’autres factions plus radicales qui ont profité pour faire des démonstrations de force à tous les niveaux de la vie sociale. Les défis majeurs se situent sur le plan économique : inégalité régionale, explosion du chômage, blocage des secteurs essentiels au développement économique, des modèles socio-économiques à reconstruire ou à réinventer et un investissement local ou étranger à rassurer et à impulser…
Certes, régler ces enjeux demandera du temps, mais il sera essentiel d’élaborer des stratégies de développement, de définir des lignes claires de nos nouvelles ambitions même s’il nous faudra des années pour les exécuter et les mettre en place. L’année qui commence ne sera pas facile d’autant plus que nous ne devons compter que sur nos propres ressources et notre ingéniosité.              

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